Vainqueur du Grand Prix du Qatar, Enea Bastianini était au rendez-vous de l’histoire. Celle de son retour chez Gresini Racing, équipe où il avait débuté en mondial en 2014. Et celle du team lui-même, redevenu indépendant en 2022, et dont le regretté Fausto Gresini serait fier.
On aurait tant aimé que Fausto Gresini voit ça. Et on est sûr que, de là où il est, il a adoré le spectacle. Enea Bastianini n’a pas manqué de lui dédier ce moment, qui marquera à jamais sa vie. Comme celle de l’équipe Gresini Racing, redevenue indépendante en 2022 après sept années de collaboration avec Aprilia. Et qui n’avait plus gagné en MotoGP depuis Estoril 2006, avec Toni Elias.
Huit ans plus tôt, en 2014, c’est bien avec Fausto Gresini qu’Enea Bastianini avait fait ses débuts en championnat du monde, en Moto3. Une première saison prometteuse, suivie d’une médaille de bronze en 2015, et d’argent en 2016. L’Italien partit ensuite vers’ d’autres horizons pour finir son chemin dans la petite catégorie, avant de grimper en Moto2 (2019) et d’en devenir champion du monde en 2020, avec l’italtrans Racing Team.
Recruté par Ducati pour rouler en MotoGP, il a été placé chez Avintia Esponsorama Racing en 2021. Une première campagne terminée sur six résultats consécutifs dans le top-10, dont deux podiums à Misano. Et un retour chez Gresini Racing, fourni en matériel par Ducati, en 2022. Fausto malheureusement disparu, l’équipe a été reprise par sa femme, Nadia Padovani, qui s’attache à faire survivre l’esprit de son mari dans le box.
Deuxième aux essais à Losail – la meilleure qualification de sa carrière –, Enea Bastianini a perdu quelques places au départ, sans toutefois perdre le contact. Présent dans le groupe de tête, il est monté en flèche au fil des kilomètres, avant d’effacer coup sur coup Marc Marquez et Brad Binder. Restait alors à aller chercher Pol Espargaro, une seconde devant. Il se savait en meilleure posture, car équipé d’un pneu medium à l’arrière, contre un soft qui allait s’user en fin de course pour le leader. L’écart a été comblé en 5-6 tours, et le pilote Honda n’a pu résister à son adversaire.
Plus rapide que jamais au guidon d’une GP21 déjà au point, « sans pression » parce qu’il n’est pas dans l’équipe d’usine, Enea Bastianini vit un rêve éveillé. Son résultat en fait le premier leader d’une saison 2022 dont il fait désormais partie des protagonistes. La suite ? Elle reste à écrire. Mais bien qu’on ne soit qu’au premier Grand Prix, il y a des signes qui ne trompent pas. Et il faudra compter sur Bestia dans les prochains mois.
La surprise du week-end : « C’était inattendu. Gagner était inattendu, mais j’ai vu le regard de Nadia, le regard de Fausto, la motivation de Fausto avec cette équipe, tous les visages des gens du team… »
Le pneu medium à l’arrière, un choix décisif : « Nous avons vu un bon potentiel durant les tests, et en arrivant ici on a passé un autre cap avec les réglages et l’électronique. Samedi on a fait un très bon temps en qualification pour la première fois, et je partais de la première ligne. Pour moi le meilleur choix était le pneu medium à l’arrière, il était plus stable que le soft dans les virages lents. Ce n’était pas facile, surtout en première partie de course, car Pol a beaucoup poussé (avec le pneu soft), mais c’était le meilleur choix pour les derniers tours car car j’ai beaucoup poussé pour réduire l’écart, puis gagner. Les pneus sont la clé en MotoGP. »
Je n’avais pas de plan car je n’étais jamais parti depuis la première ligne ne MotoGP. J’étais derrière en première partie de course, j’ai dû gérer les pneus pour la fin. Ces 2-3 dernières années, je pense que le meilleur choix est de toujours d’économiser les pneus pour la fin de la course, mais tous les pilotes essaient de le faire. Pour aujourd’hui je pense que j’ai été le meilleur à le faire, on verra si on peut continuer dans cette direction. »
Le dernier tour : « L’un des plus longs tours de ma vie ! Je me souviens avoir eu la même sensation à Portimao quand j’ai gagné le titre Moto2. Ce n’était pas facile car Brad était très poche, et je n’ai poussé pas trop fort pour ne pas prendre de risques. Mais c’était fantastique de comprendre ce qui allait arriver après le passage du drapeau à damiers. »
L’esprit de Fausto Gresini : « C’est vraiment beau car Fausto était une très belle personne, et maintenant Nadia mène le team et le climat est fantastique, tous les gens sont très motivés, et c’est pourquoi il a été possible de faire ça aujourd’hui. »
La GP21 lui va comme un gant : « Pour le moment la GP21 est une très bonne moto pour moi. J’ai compris son potentiel quand je l’ai essayée à Jerez, l’an dernier. Je ne suis pas dans une équipe d’usine et je ne sais pas si viendront de nouvelles pièces de la GP22, mais pour le moment c’est l’une des meilleures motos et j’ai l’un des meilleurs teams derrière moi. »
Encourageant pour la suite : « Je ne sais pas si nous pourrons être aussi rapides partout, mais pour le moment nous avons une bonne moto et un bon potentiel. Nous avons été rapides aux tests de Jerez et de Mandalika, et à Sepang j’ai battu le record. J’essaierai tout le temps de monter sur le podium cette année, mais parfois ce sera difficile. »
Pas la pression de l’équipe d’usine : « Je n’ai pas beaucoup de pression dans mon team car je ne suis pas dans l’équipe d’usine, et je pense que pour le moment, les autres, qui ont la GP22, ont plus de pression. »
Un tempérament calme : « J’ai beaucoup changé depuis que je suis arrivé en championnat du monde, en 2014. Avant j’étais très agressif, maintenant je travaille beaucoup pour être plus calme, surtout durant les essais libres, car être nerveux n’est pas le mieux à faire. Mon team est aussi comme moi, j’ai très confiance quand je parle avec eux et on gère ça très bien pour le moment. »