Christian Lavieille : « À Spa, la victoire se mérite plus qu’ailleurs ! »
Recordman de victoires à Spa-Francorchamps avec quatre succès (1991, 1998, 2001 et 2002), Christian Lavieille nous livre ses souvenirs et donne quelques conseils aux pilotes qui vont découvrir ce tracé à l’occasion des prochaines 24h de Spa, le week-end du 5 juin.
GP-Inside : Cher Christian, comment vas-tu ?
Christian Lavieille : « Je vais très bien ! J’ai poursuivi une carrière dans l’automobile après ma carrière moto que j’ai arrêtée il y a exactement vingt ans, puisqu’en 2002 j’ai fait les 24h de Spa en auto et en moto la même année, et j’ai enchaîné avec mon premier Dakar dans la foulée. À ce jour, j’en compte 19 à mon compteur ! La situation est moins facile aujourd’hui, notamment à cause de la pandémie et des budgets qui ont sensiblement rétréci, mais je continue à pouvoir faire quelques épreuves et à y prendre beaucoup de plaisir. Je suis aussi consultant pour la chaîne L’Équipe pour les courses d’endurance. Je viens d’ailleurs de commenter les 24h du Mans moto, et je suis consultant du circuit Paul Ricard pour la sécurité des courses d’endurance depuis le retour du Bol d’or au Castellet. »
Tu détiens le record du nombre de victoires à Spa, quels souvenirs en gardes-tu ?
C.L : « J’ai effectivement gagné quatre fois en une dizaine de participations et j’en conserve d’excellents souvenirs, mais c’était toujours des courses difficiles. Une épreuve d’endurance de 24 heures est toujours épuisante, mais à Spa, c’est encore plus dur ! Je me souviens très bien de ma première participation, c’était en 1991 et je n’avais jamais roulé sur ce circuit très exigeant de plus de sept kilomètres. On a eu un déluge pendant 23 heures sur 24, c’était l’enfer ! Il fallait couper les gaz dans les lignes droites pour ne pas partir en aquaplaning ! Je te laisse imaginer que les combinaisons de pluie de l’époque n’étaient pas très efficaces, et on était trempés en quelques minutes. Très sincèrement, ce sont surtout mes deux coéquipiers, Dominique Sarron et Stéphane Mertens, qui ont le plus roulé, mais on a quand même réussi à gagner, dès ma première participation. Le soleil est juste revenu à une heure de l’arrivée et pour le podium ! »
« C’est vraiment un circuit de gros cœur avec de longs virages qui passent très vite, avec beaucoup d’angle. A l’époque, le panneautage se faisait dans la descente où il fallait raser le mur entre le virage de ‘La Source’ et ‘L’eau Rouge’ pour avoir le plus de vitesse possible pour attaquer le ‘Raidillon’. Ensuite, il y a une grosse compression et la moto bouge beaucoup dans le droite-gauche de la remontée, c’est assez physique. Je me souviens aussi qu’il n’y avait pas de voie de sécurité, donc il pouvait arriver de devoir doubler une ambulance pendant la course ! C’était assez folklorique avec une ambiance générale de kermesse franchement sympa.
Quels conseils donnerais-tu aux pilotes qui vont découvrir ce circuit ?
C.L : « C’est sans aucun doute l’un des plus beaux tracés du monde, vraiment plaisant en termes de pilotage mais difficile à apprendre, donc il faut faire le plus de tours possibles aux essais pour bien prendre ses repères. Il faut aussi avoir un éclairage puissant et bien réglé pour la nuit car il fait très sombre dans la forêt au bout du circuit. Et même si les récents travaux d’aménagement ont probablement amélioré la visibilité nocturne, il faut impérativement bien voir la piste pour ne pas rater le point de corde dans les virages qui passent à plus de 200 km/h. »
« C’est également un circuit très exigeant physiquement où on est très souvent à pleine charge avec peu d’endroits pour souffler. D’ailleurs, les moteurs risquent aussi de souffrir en étant souvent à fond. À Spa, il faut tout le temps être vigilant, surveiller aussi les nuages car il peut pleuvoir à ‘Stavelot’ mais pas à ‘La Source’. Et puis il ne faut pas faire d’erreur sur les ravitaillements parce que si tu tombes en panne d’essence aux ‘Combes’, tu mets un moment avant de revenir aux stands. Mais c’est pour toutes ces raisons que la victoire y est belle et qu’on s’en souvient longtemps ! »
Crédit photos : Guy Thonus