« Je suis la personne la plus heureuse du monde. » Ému aux larmes, Aleix Espargaro a décroché à Termas de Río Hondo sa première victoire en MotoGP. Elle arrive après de longues années partagées entre le travail, la souffrance, les progrès et une abnégation digne d’un champion.
Il lui aura fallu attendre 200 départs en MotoGP, 284 au total. Jamais il n’a abandonné, même dans les moments les plus difficiles. Ceux où il enchaînait chutes, pannes et mauvais résultats, en dépit d’une immense dose de travail. Ce dimanche 3 avril, Aleix Espargaro est enfin rentré dans le cercle des vainqueurs de Grands Prix, à l’issue d’un week-end de rêve en Argentine.
Leader à l’issue des essais libres, l’Espagnol a d’abord offert à Aprilia sa première pole en MotoGP. La précédente de la marque en catégorie reine remontait au Grand Prix d’Australie 2000, à l’époque des 500cc, avec le Britannique Jeremy McWilliams. De la première pole de la RS-GP à sa première victoire, il y avait un pas que le numéro 41 était bien décidé à franchir.
Devancé par Jorge Martin au départ, Aleix Espargaro s’est mis dans la roue de son compatriote et l’a suivi durant une bonne partie de la course. Par deux fois, il a tenté de le doubler au bout de la plus longue ligne droite du circuit ; par deux fois, il a écarté dans le virage suivant et dû rendre la première place. Jusqu’à ce que la troisième tentative soit la bonne, au 21e des 25 tours.
Ce premier succès en carrière fait du pilote Aprilia le nouveau leader du championnat du monde. À 32 ans, il est « la personne la plus heureuse du monde » et récolte les fruits d’un travail que tous lui reconnaissent. La saison est encore longue, mais il ne s’interdit pas de rêver à une lutte pour le titre suprême.
Une victoire amplement méritée : « Je suis si heureux. Je n’arrive pas à y croire. Ça a été un très bon week-end, mais tellement bon qu’avant de prendre le départ, tout le monde me disait : ‘Tu as le rythme, c’est pour toi…’ Je leur disais : ‘Si vous voulez, qu’on me donne la coupe et je ne roule pas.’ Je n’avais jamais géré une telle situation. Ça n’a pas été facile. »
« La piste a beaucoup changé car la moto glissait beaucoup. J’ai beaucoup travaillé avec les boutons, le contrôle de traction, le frein moteur, pour pouvoir arriver aux cinq derniers tours un peu mieux que Jorge, et ça a marché. J’ai passé beaucoup d’années à souffrir. Samedi soir je me disais : ‘Essaie de profiter, tu as fait la pole, savoure là. Dimanche profite d’être premier sur la grille, de n’avoir personne devant, d’être le plus rapide en piste, calme.’ Et j’ai réussi. »
Ne jamais abandonner : « Ça a été très difficile. De fait, il y a eu un point d’inflexion il y a quelques années, avec la plus grande aide de ma vie, ma femme, grâce à qui je réussis et pour la stabilité qu’elle me donne. Je lui ai dit : ‘Laura, je ne suis pas heureux. Il y a 18 courses par an, je me fais mal, j’ai chuté plus de 20 fois donc on va faire autre chose.’ Et j’en ai parlé avec Aprilia. Est arrivé Massimo Rivola et il a changé la marque. En piste je n’ai jamais abandonné, j’y ai toujours cru, j’ai toujours travaillé et quand j’étais sur le circuit, bien que les résultats étaient mauvais, je crois avoir démontré à tout le monde, surtout à Aprilia, qu’ils n’ont jamais eu un pilote aussi travailleur que moi. Je suis très heureux que nous ayons réussi. »
La première victoire en carrière : « J’aimerais dédier cette victoire à mes parents pour tous les efforts faits durant toutes ces années. Ça valait la peine car ils ont deux enfants en MotoGP (avec son frère Pol, NDLR), avec deux belles familles, et ils réussissent leurs rêves. Et maintenant ils ont deux vainqueurs, donc c’est pour eux. »
Leader du classement général : « Nous avons remporté un Grand Prix, nous menons le championnat. Je me souviens d’interviews il y a cinq ans, quand je disais que mon rêve était d’être champion du monde et qu’on me disait que c’était impossible. Et bien, peut-être pas. Nous travaillons et obtenons de très belles choses. »
« Trois courses ont passé, j’en ai gagné une puis j’ai terminé 4e à Losail et 9e sur le mouillé à Mandalika. On en est là. Personne ne nous a fait de cadeau et je suis en tête. Il reste beaucoup de courses mais nous sommes parmi les candidats. Je vais continuer avec les pieds sur Terre, travailler, garder la tête froide et tout donner. Si, durant toutes ces années, j’ai été capable de surmonter toutes ces courses difficiles en étant 20e, 18e, avec des chutes, je crois que je vais aimer être dans cette situation. Je suis la personne la plus heureuse du monde. »
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