Stéphane Chambon : « Ça doit fumer dans le cerveau des japonais ! »
Génial pilote éclectique, Stéphane Chambon a empilé les titres dans sa carrière, en motocross, en supermotard et finalement en championnat du monde Supersport (1999). Retraité actif depuis quelques années, il ne manque pas une course de moto, et nous livre son analyse du dernier Grand Prix d’Argentine.
GP Inside : Que deviens-tu depuis que tu as mis un terme à ta carrière moto, en 2006 ?
Stéphane Chambon : « Depuis cette année, je reviens un peu sur les circuits de vitesse puisque j’accompagne mon neveu (Matéo Pédeneau, le fils de sa sœur, NDLR) qui dispute le championnat de France Supersport, Je fais aussi un peu de coaching en motocross sur le circuit de Pernes, à côté de chez moi, Bref, je m’occupe tranquillement en me faisant plaisir. La gestion de l’après-carrière n’est jamais simple pour un pilote, d’autant que je n’avais rien anticipé. Tout s’arrête du jour au lendemain. J’ai longtemps été en manque de ces ambiances de course, de l’atmosphère du paddock, des sensations et de l’adrénaline de la compétition, alors j’ai essayé de combler ce manque en faisant quelques courses en voiture ou en buggy. Mais moralement, ce n’est pas simple. On prend un bon coup sur la tête quand ça s’arrête. »
As-tu vu le Grand Prix d’Argentine ?
S.C : « Sauf empêchement majeur, je ne rate aucune course du Supersport, du Superbike ou du MotoGP, toutes les courses moto m’intéressent. Pour ce Grand Prix d’Argentine, je pense d’abord que le regroupement des essais sur une seule journée n’a finalement pas été trop pénalisant pour les pilotes. Et de toute manière, c’était pareil pour tout le monde. D’ailleurs, ça pourrait probablement limiter les coûts de faire les Grands Prix sur deux jours au lieu de trois, c’est peut être pas une mauvaise idée ! »
« La course n’a pas offert autant de dépassements que d’habitude, mais la bagarre en tête était animée entre Martin et Espargaro qui sont parvenus à s’échapper rapidement. J’ai été impressionné par les progrès de l’Aprilia, qui ne perdait rien en vitesse de pointe dans la ligne droite et qui parvenait même à déboîter la Ducati à l’aspiration, et qui semblait très stable dans les enchaînements de virages. Bravo à Espargaro car on savait qu’il était rapide mais là, il a prouvé qu’il fallait aussi l’ajouter à la longue liste des postulants pour le titre, d’autant que Martin n’a commis aucune erreur pendant toute la course ! C’est franchement un excellent début de saison pour Aprilia : première victoire en MotoGP, première victoire pour leur pilote désormais en tête du championnat… Ça devrait leur donner des ailes ! »
« Les deux Suzuki ont également été solides depuis le début de la saison, et même si elles ne se sont jamais battues pour la victoire, elles ne sont pas loin derrière. Il ne leur manque pas grand chose. En ce qui concerne nos deux français, le résultat est évidemment décevant. Ils ont perdu trop de places dans le premier tour, peut être par manque d’agressivité, et ensuite le rythme est tellement élevé qu’il est difficile de revenir. Pour Zarco qui chute, c’est forcément dur pour le moral, d’autant que Martin, son coéquipier, termine deuxième. Mais il a de l’expérience, il sait qu’un championnat est long et je pense que Jean-Michel Bayle saura trouver les mots pour le remotiver pour la suite. Quant à Fabio Quartararo, il limite bien les dégâts avec sa huitième place, même si avant la course je pensais qu’il pouvait faire mieux. Sa situation n’est pas simple car on voit qu’il peut faire les mêmes chronos que les meilleurs quand il est seul, mais en bagarre son déficit de puissance le pénalise trop pour l’instant. »
Qui seront les trois premiers à la fin de l’année ?
S.C : « C’est vraiment une question difficile quand tu vois qu’on trouve neuf pilotes différents sur les trois premiers podiums de la saison. Sans donner de hiérarchie, je pense que Fabio en fera partie. Je vois bien aussi une des deux Suzuki, et également Martin ou Espargaro. Mais en disant ça, je réalise que je ne mets pas Bagnaia ou Zarco, et peut-être qu’un des deux va gagner les trois prochaines courses… Non, c’est vraiment impossible de faire un pronostic crédible aujourd’hui ! La seule certitude, c’est que trois constructeurs se sont imposés pour l’instant : Ducati, KTM et Aprilia, donc trois marques européennes. J’imagine que ça doit fumer actuellement dans le cerveau des ingénieurs japonais ! »